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Chapitre 4

 

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    Zen, je contemple un moment la toile marine qui s’étend jusqu’à perte de vue, avec l’astre jaune sagesse en fond de tableau. Fermant alors les yeux, je m’applique à faire le vide pour me laisser envelopper dans le cocon spirituel que tisse la voix soyeuse. Cette fois encore, des images oniriques défilent derrière mes paupières closes. Celles-ci vibrent à l’unisson d’irréalités presque palpables, dans lesquelles s’y fondent l’âme et l’esprit. À chaque vibration, je me sublime un peu plus au sein de contrées menant à la conscience de soi. Une autre image se forge alors devant mon regard intérieur. Tout d’abord, à peine éthérée, celle-ci se matérialise de seconde en seconde pour devenir matière solide, dont se compose un décor de style roman qui m’est familier. J’entrevois au travers de volutes d’encens, dont je perçois étrangement le parfum, un chœur d’église ou de chapelle – que sais-je – en tout cas un endroit de prière. Face à moi, en robe de bure, un groupe d’une dizaine de sœurs – bonnes ou mauvaises, je l’ignore – alignées en rang et voilées comme il se doit – enfin je suppose – accompagne cette voix qui s’élève de la nef à la voûte. Celle-ci semble vouloir percer la toiture de l’édifice pour s’en aller gravir les octaves célestes. Pourtant, cette voix est différente de celle qui sortait du compact il y a quelques instants et qu’à ce moment précis, je n’ouïs plus. Je suis ailleurs, loin de ce bord, de cette mer, à l’intérieur des terres, auprès de l’eau douce d’un fleuve. Je sens d’ailleurs son effluve que charrie un autre temps. Tout à coup, je me rends compte, sidérée, que cette voix pure de Bénédictine qui me prend à la gorge, n’est autre… que la mienne.

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